La naloxone sauve des vies : qu’en pensent les usagers ?

Introduction En France, 503 décès sont rapportés dans l’enquête Décès en Relation avec l’Abus de Médicaments et de Substances (DRAMES 2019) : les opioïdes en tête (méthadone : 35 % des décès). Une surdose mortelle aux opioïdes est évitable. La naloxone est disponible depuis 2018 pour prévenir cette surmortalité cependant sa diffusion reste faible. Le CEIP-A souhaite interroger les usagers pour leur donner la parole sur cet outil. L’objectif est d’évaluer les croyances et les freins autour de l’utilisation de la naloxone tout en délivrant un kit naloxone après formation. Matériel et méthode À travers un hétéroquestionnaire, la parole de l’usager est recueillie entre novembre 2021 et avril 2022 dans différentes structures de prise en charge addictologique. Résultats Au total, 44 usagers ont répondu à l’hétéroquestionnaire (48 % n’ont pu le finaliser par fatigue/impatience/longueur), 37 kits de naloxone ont été délivrés. Les usagers sont des hommes (95 %), d’âge moyen 43 ans et sous médicaments de substitution aux opiacés à 80 %. Cette étude identifie des risques d’overdose : polyconsommation (73 %) et expérience passée d’une overdose (68 %) (pour eux-mêmes [1/2] ou pour autrui [2/3]). Concernant la naloxone, 45 % ont une préférence de voie d’administration et parmi eux 65 % penchent pour la voie intramusculaire (croyance : considérée comme plus rapide et plus efficace). Seuls 35 % préfèrent l’intranasale (croyance : considérée comme dangereuse dans un contexte de difficultés respiratoires). D’autres l’identifient comme plus simple et plus rapide mais plus difficile à obtenir. Les freins (différents selon les structures) résident à la fois dans l’impression de « gérer les produits » (usagers du CAARUD ou SCMR), « d’être sorti de l’addiction » (usagers du CSAPA) mais aussi dans l’idée fausse que la voie orale ne peut mener à une overdose (11 %). L’étude montre la nécessité d’une piqûre de rappel pour la formation naloxone (difficultés de mémorisation/compréhension). Les usagers font peu de lien entre l’overdose et la remise en question des consommations (retour du passeur du questionnaire). Sur la période d’étude, deux usagers ont rapporté avoir fait l’usage du kit. Conclusion Notre étude montre que les freins et croyances sur la naloxone varient en fonction des profils d’usagers (parcours de consommation, structures de prise en charge, entourage…). Ces différences sont à prendre en compte pour aborder l’intérêt de la naloxone. Par ailleurs, la mise en place de groupes de parole sur les overdoses pourrait être un levier intéressant à développer avec les usagers.