Mise en oeuvre d’un dépistage optimisé pour prévenir les risques infectieux dans la population migrante : étude MIGRINF

Introduction Les migrants sont tres exposes a la multiresistance aux antibiotiques et aux infections en raison d’une prevalence elevee dans les pays d’origine et conditions de vie precaires pendant et apres la migration. Il existe peu de donnees sur la colonisation par des Bacteries MultiResistantes (BMR) et Hautement Resistantes emergentes (BHRe) chez les migrants arrivant en France. Par ailleurs, il n’existe pas de recommandation francaise sur le depistage des maladies infectieuses des primo-arrivants. Materiels et methodes Les migrants, arrives depuis moins de 1 an, consultant ou hospitalises dans un service de maladies infectieuses et tropicales d’un centre hospitalo-universitaire ont ete inclus. L’objectif principal etait d’evaluer le taux de colonisation par une BMR (Staphylococcus aureus resistant a la meticilline (SARM), enterobacterie productrice de β-lactamase a spectre etendu (EBLSE) ou une BHRe (enterobacterie productrice de carbapenemase, enterocoque resistant a la vancomycine) et les facteurs de risque associes. Les prevalences du VIH, de l’Ag HBs, du VHC, de la syphilis, de Chlamydia trachomatis (CT), de Neisseria gonorrhoeae et de schistomiases ont ete evaluees. Les antecedents d’abus physique ou sexuel et les symptomes de depression ou syndrome de stress post-traumatique (PTSD) ont egalement ete recueillis. Resultats Sur 1 an, 101 patients ont ete inclus dont 79 etaient originaires d’Afrique subsaharienne (79 %) et 45 etaient des demandeurs d’asile (45 %). Cinq souches de SARM (5,4 %, n = 92) et 15 EBLSE (16,3 %, n = 92) ont ete isolees a partir des prelevements de depistage. Aucune BHRe n’a ete retrouvee. En analyse univariee, la colonisation par une BMR etait significativement associee a la seropositivite au VIH et a la duree de la migration. Dans cette population, la prevalence du VIH, des infections chroniques par le VHB et le VHC a ete estimee a 40 % [IC 95 %, 30,1–49,1], 33 % [IC 95 %, 23,5–41,8] et 5 % [IC 95 %, 0,7–9,2] respectivement. Onze patients sur 73 avaient une serologie schistosomiase positive (15 %). Six patients sur 77 avaient une infection a CT (7,8 %). Des antecedents de violence physique pendant la migration ont ete signales chez 43 % des patients (41/96) et des violences sexuelles chez 43 % des femmes (12/28). Trente et un patients (32 %) presentaient des symptomes de depression ou de PTSD. Conclusion Le taux de colonisation par une BMR est eleve dans cette population ainsi que le taux d’infections bacteriennes ou virales et de troubles psychiatriques. Des recommandations sur la prise en charge des migrants apparaissent ainsi necessaires.