La primiparité est-elle le seul facteur de risque des lésions du sphincter anal en cours d'accouchement?

Gynécologie Obstétrique & Fertilité(2007)

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Abstract
Patientes et méthodes Deux groupes ont été comparés : le groupe A ou groupe d'étude ( n = 63) correspondant aux patientes ayant eu une lésion périnéale sévère (type 3 ou 4) durant leur accouchement. Le groupe B ou groupe témoin ( n = 67), correspondant aux patientes ayant accouché sans lésion périnéale durant la même période. L'appariement a été effectué en fonction de la date d'accouchement. Ainsi, ont été comparés les paramètres cliniques suivants : âge maternel, origine ethnique, poids maternel, IMC (Index de masse corporelle), parité, type d'analgésie, âge gestationnel, terme, durée de la première et de la deuxième phase du travail, poids fœtal, mode d'extraction instrumentale, type d'instrument utilisé. Ont été également comparés les facteurs suivants : obésité maternelle, macrosomie foetale, dépassement de terme, première ou deuxième phase prolongée, existence d'une difficulté aux épaules, type d'instrument utilisé, existence d'une variété postérieure, réalisation d'une épisiotomie médiolatérale et quantité totale d'ocytocine utilisée en cours de travail. Résultats La primiparité est retrouvée comme étant un facteur de risque de lésions périnéales sévères en cours d'accouchement (71 versus 43 %, p = 0,001). Mais, d'autres facteurs lui sont associés : le poids maternel de même que l'IMC (67 versus 63 kg, p = 0,036 ; 25,6 versus 23,4, p = 0,003), la durée de la deuxième phase de travail (68 versus 48 min, p = 0,037) et la variété postérieure de la présentation (32 versus 4 %, p < 0,001). L'association à une dystocie des épaules est à la limite de la significativité (6 versus 0 %, p = 0,052). L'extraction instrumentale est significativement associée à la survenue de lésions périnéales sévères, tous instruments confondus (44 versus 1 %, p < 0,001) ou indépendamment : forceps de Tarnier (14 versus 1 %, p = 0,003), forceps de Suzor (16 versus 0 %, p = 0,0005) ou spatules de Thierry (14 versus 0 %, p = 0,0005). L'épisiotomie médiolatérale n'apparaît pas isolément comme facteur de risque de lésions périnéales. En revanche, son association à une extraction instrumentale constitue un risque fort (43 versus 1 %, p < 0,0001). Les paramètres fœtaux, l'âge maternel, l'obésité, l'âge gestationnel, le dépassement de terme, l'anesthésie et la dose d'ocytocine ne sont pas considérés comme facteurs de risques. Discussion et conclusion La primiparité n'est pas un facteur isolé de lésions périnéales sévères. Les autres facteurs de risque retrouvés sont l'extraction instrumentale, la variété postérieure de la présentation, l'épisiotomie médiolatérale lorsqu'elle est associée à une extraction instrumentale. Abstract Objective Primiparity has been identified as the main risk factor of type 3 and 4 perineal injuries The purpose of our study, according to a population-based observational study, was to identify other clinical risk factors for lesions during vaginal delivery. Patients and methods Two groups have been compared. Group A or study group (n=63) was defined as parturients with three or four-degree perineal tears. Group B or control group (n=67) included women who delivered vaginally without any perineal lesion during the same period. Characteristics of the population were compared: maternal age, race, maternal weight, BMI (Body Mass Index), parity, mode of anaesthesia, gestational age, post maturity, length of labor, fetal weight, mode of delivery (assisted or not). Specific characteristics were also compared, obesity, shoulder dystocia, type of presentation, episiotomy and dose of ocytocin. Results Primiparity was significantly associated with higher frequency of sphincter lacerations (71 vs 43%, p = 0.001). The patients of group A were with significantly higher weight than the patients of control group (67 vs 63 kg, p = 0.036). Futhermore the BMI was different in the two groups (25,6 vs 23,4, p = 0.003). There was a significant difference according to the length of the second part of labor (68 vs 48 min, p = 0.037) and the posterior variety (32 vs 4%, p < 0.001). The occurrence of shoulder dystocia was only just significant (6 vs 0%, p = 0.052). Assisted-extraction is highly associated with perineal injuries (44 vs 1%, p < 0.001). Futhermore the instrument has been concerned by the difference: Tarnier's forceps-assisted extraction (14 vs 1%, p = 0.003), Suzor's forceps-assisted extraction (16 vs 0%, p = 0.0005), Thierry's spatula-assisted extraction (14 vs 0%, p = 0,0005). The association forceps and episiotomy has been found with higher frequency of perineal injury (43 vs 1%, p < 0,0001). There were no difference between the 2 groups according fetal characteristics, type of analgesia, maternal age, gestational age, post-maturity or dose of ocytocin. Discussion and conclusion Primiparity is not the only risk factor of perineal injuries. Other risk factors have been found: assisted-extraction, occiput posterior fetal head position, and association episiotomy and assisted-extraction. Black origin seems to be protective. Mots clés Lésions périnéales sévères Facteurs de risque Keywords Severe perineal tears Risk factors 1 Introduction Les lésions du sphincter anal ou déchirures périnéales sévères (types 3 et 4) du per-partum sont rares. Elles surviennent dans 1,7 à 7,3 % [1–6] des accouchements par voie basse. La prise en charge de ces lésions, en particulier leur prévention, est depuis toujours une préoccupation majeure des obstétriciens et sages-femmes. En effet, de telles déchirures ont des conséquences néfastes à court et long terme, tant en terme de douleurs périnéales que sur le plan de la continence urinaire et anale ultérieure. Cela sous-entend une parfaite connaissance des facteurs de risque, pouvant conduire à la survenue de telles lésions et des situations, parmi l'étendue des pratiques obstétricales actuelles, pouvant y amener. La primiparité est, pour la plupart des auteurs, retrouvée comme facteur de risque essentiel et indépendant de lésion du sphincter anal en cours d'accouchement. D'autres facteurs sont retrouvés dans la littérature. Les facteurs maternels : ils incluent primiparité et périnée fragile, œdématié, cicatriciel ou hypoplasique. Les facteurs fœtaux : macrosomie, présentations occipitosacrées ou, de la face et les expulsions rapides. Les facteurs opératoires incluent : extractions instrumentales, manœuvres obstétricales et épisiotomie médiane. Le but de notre étude est de définir les facteurs de risques de lésions périnéales sévères retrouvées à partir d'une cohorte de 63 patientes, comparées à 67 patientes indemnes de lésions suivant une étude observationnelle transversale. 2 Patientes et méthodes Soixante-trois patientes ayant présenté une déchirure périnéale obstétricale sévère ont été comparées à 67 patientes indemnes de lésion suivant une étude observationnelle transversale. Cette étude porte sur la période de mai 1998 à mai 2003 à la maternité de l'hôpital Beaujon (APHP, France) soit 9639 accouchements. Dans un premier temps, ont été définis : le groupe d'étude, correspondant aux patientes ayant eu une lésion périnéale de type 3 ou 4 lors de leur accouchement et un groupe témoin, correspondant aux femmes ayant accouché dans la même période sans lésion périnéale, l'appariement étant effectué pour un accouchement dans la même période. Ont été exclues les césariennes ( n = 1740), les sièges ( n = 51), les grossesses gémellaires ( n = 78), seules les grossesses de plus de 37 SA ont été incluses. Nous avons défini, la déchirure périnéale complète ou du troisième degré comme une lésion périnéale associant une rupture du sphincter externe de l'anus à une ou plusieurs déchirures périnéales simples. Le toucher rectal s'assurant de l'intégrité de la cloison rectovaginale. Dans les déchirures complètes compliquées ou du quatrième degré, la paroi rectale est rompue réalisant un cloaque entre le vagin et le rectum. La réparation des déchirures périnéales a dans tous les cas comporté un premier temps d'exposition et d'évaluation des lésions à traiter, ces réparations ayant été effectuées sous anesthésie locorégionale ou générale. La réparation des lésions du troisième degré a intéressé dans un premier temps la suture du sphincter strié anal mettant bord à bord les deux berges par deux points en U à l'aide d'un fil à résorption lente, les temps suivants étant ceux de toute périnéorraphie réalisée après épisiotomie. La réparation des déchirures du quatrième degré a débuté par la suture de la paroi digestive par des points séparés au fil tressé à résorption lente noués dans la lumière digestive. Il s'agit d'une suture de type digestif, prenant la paroi rectale et anale, en ayant soin de bien charger la musculeuse, les points devant être rapprochés, afin que la paroi soit étanche. Les temps ultérieurs sont ceux d'une lésion du troisième degré. Cette réparation est toujours conduite sous antibioprophylaxie. Les soins postopératoires associent une toilette périnéale biquotidienne à l'aide d'une solution antiseptique à une toilette périnéale après chaque miction et chaque selle. Il a été prescrit des laxatifs lubrifiants ou osmotiques et un régime sans résidu. Une rééducation périnéale a été systématiquement prescrite à la visite postnatale [7] . Durant l'étude, les données concernant la patiente, le déroulement du travail, l'expulsion et les caractéristiques de la continence dans le post-partum immédiat ont été recueillies ( Tableau 1 ). Les données collectées concernant la patiente ; ont été l'âge, l'origine géographique, la gestité, la parité, l'indice de masse corporelle (IMC) et l'existence d'une obésité définie par un IMC > 30 kg/m 2 . Les critères d'évaluation du travail ont été l'âge gestationnel à l'accouchement, le déclenchement spontané ou non, la durée de la première et de la deuxième phase du travail, le type d'analgésie et la dose totale d'ocytocine utilisée. Nous avons défini la première phase du travail par la période allant de l'entrée en travail (existence de contractions régulières, efficaces, intéressant tout l'utérus associées à la dilatation cervicale) à la dilatation cervicale complète (effacement et dilatation complète). La seconde partie du travail par la descente du mobile fœtal dans l'excavation pelvienne jusqu'à l'expulsion. Ont été recueillies les données de biométrie fœtale soit le périmètre crânien, le diamètre bipariétal, le poids fœtal et la macrosomie fœtale étant définie par un poids fœtal supérieur à 4000 g. Concernant l'extraction, ont été recueillis les paramètres suivants : l'extraction instrumentale, le type d'instrument utilisé (forceps de Tarnier, de Suzor, spatules de Thierry), la réalisation d'une épisiotomie médiolatérale, la variété postérieure ou antérieure lors du dégagement et une éventuelle difficulté aux épaules. Il a été noté, pour le groupe étudié, le grade de la lésion périnéale. Après vérification de la normalité des distributions, les moyennes dans les deux groupes ont été comparées par le test t de Student. La comparaison des fréquences a été effectuée par le test du Chi 2 ou, lorsque les conditions de validité de ce dernier n'étaient pas remplies, par le test exact de Fisher. Faute d'un nombre suffisant de patientes, les techniques d'évaluation des facteurs de risque plus performantes comme la régression logistique n'ont pu être employées dans des conditions de validité acceptables. 3 Résultats 3.1 Caractéristiques de la population ( Tableau 1 ) Le groupe d'étude est composé de 63 patientes de 29,2 ans en moyenne avec un écart-type à 5,51 et des extrêmes entre 17 et 42 ans. Ces femmes sont dans 32 % d'origine blanche, dans 40 % d'origine noire et dans 28 % d'une autre origine. Le poids moyen est de 67 kg avec un écart-type à 12,91 et des extrêmes allant de 38 à 114 kg. La taille moyenne est de 162 cm. L'IMC moyen est 25,6 et la proportion d'obèses de 14 %. Il y a 71 % de primipares, l'âge gestationnel moyen est de 39,9 semaines d'aménorrhée (SA) avec une proportion de terme dépassé de 11 %. Concernant le travail, la dose moyenne d'ocytocine est de 14,8 UI avec un écart-type à 11,47 et des extrêmes allant de 1 à 38 UI. La première phase du travail dure en moyenne 333,4 minutes et la seconde 68 minutes avec un pourcentage de deuxième phase de plus de 120 minutes de 22 %. Les paramètres fœtaux montrent 32 % de variété postérieure, un poids moyen de naissance de 3381,4 g, 11 % d'enfants macrosomes et quatre cas de difficultés aux épaules soit 6 %. L'accouchement a eu lieu dans 89 % des cas avec une analgésie, dont 86 % de péridurales. Il y a eu 28 cas d'extractions instrumentales (44 %), toujours réalisées avec une épisiotomie. Le groupe témoin est composé de 67 patientes de 29,7 ans en moyenne avec un écart-type à 4,63 et des extrêmes entre 19 et 38 ans. Ces femmes sont dans 33 % d'origine blanche, dans 63 % d'origine noire et dans 4 % d'une autre origine. Le poids moyen est de 63 kg avec un écart-type à 11,50 et des extrêmes allant de 42 à 102 kg. La taille moyenne est de 163,9 cm. L'IMC moyen est 23,4 et la proportion d'obèses de 8 %. Il y a 43 % de primipares, l'âge gestationnel moyen est de 40 SA avec une proportion de terme dépassé de 15 %. Concernant le travail, la dose moyenne d'ocytocine est de 14 UI avec un écart-type à 12,57 et des extrêmes allant de 1 à 57 UI. La première phase du travail dure en moyenne 283,1 minutes et la seconde 48 minutes avec un pourcentage de deuxième phase de plus de 120 minutes de 10 %. Les paramètres fœtaux montrent 4 % de variété postérieure, un poids moyen de naissance de 3388,8 g, 9 % d'enfants macrosomes et l'absence de difficulté aux épaules. L'accouchement a eu lieu dans 81 % des cas avec une analgésie, dont 76 % de péridurales. Il y a eu un cas d'extraction instrumentale (1 %). Le pourcentage d'épisiotomie est de 52 %. L'étude concernant les caractéristiques maternelles montre que l'âge des patientes est comparable dans les deux groupes (29,2 versus 29,7 ans). En revanche, les patientes présentant une lésion sphinctérienne ont un poids et un BMI (body mass index) supérieurs à celui des patientes du groupe témoin (respectivement 67 versus 63 kg, p = 0,036 et 25,6 versus 23,4, p = 0,003), l'obésité (IMC > 30) n'étant pas un facteur significatif dans notre étude (14 versus 8 %, p = 0,21). Les lésions sévères surviennent significativement moins souvent chez les femmes de race noire (40 versus 63 %, p = 0,0005). Les paramètres concernant la grossesse montrent que seule la primiparité est significativement associée une augmentation de la fréquence des lésions (71 versus 43 %, p = 0,001). En revanche, la durée de gestation (39,9 versus 40 SA, p = 0,6) ou le dépassement de terme (11 vs 15 %, p = 0,52) ne sont pas associés à une augmentation de la fréquence des lésions. 3.2 Caractéristiques du travail, du mode d'accouchement et du mobile fœtal ( Tableau 1 ) Concernant le déroulement du travail, il n'y a pas d'association entre le type d'anesthésie durant le travail et l'expulsion, qu'il s'agisse d'un travail sans ou avec analgésie (89 versus 81 %, p = 0,19) ou du type d'anesthésie locorégionale (86 versus 71 % d'anesthésie péridurale, p = 0,17) et la survenue d'une lésion périnéale sévère. De même, la dose totale d'ocytocine utilisée est comparable dans les deux groupes (14,8 versus 14 UI, p = 0,79). La durée de la première phase du travail n'est pas liée à la survenue d'une lésion périnéale stade 3 ou 4 (333,4 versus 281,1 minutes, p = 0,085) alors que la deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037). Lorsque l'on prend en compte le fait d'avoir une deuxième phase longue (> 120 minutes), la différence est à la limite de la significativité (66 versus 45 %, p = 0,068). En revanche, il existe une association avec certains paramètres du mode d'accouchement : la variété postérieure de la présentation est très significativement associée à une lésion périnéale de type 3 (32 versus 4 %, p < 0,001) alors que la survenue d'une difficulté aux épaules est à la limite de la significativité (6 versus 0 %, p = 0,052). L'extraction instrumentale est très significativement associée à la survenue de lésions périnéales sévères : tous instruments confondus (44 versus 1 %, p < 0,001) ou indépendamment : forceps de Tarnier (14 versus 1 %, p = 0,003), forceps de Suzor (16 versus 0 %, p = 0,0005) ou spatules de Thierry (14 versus 0 %, p = 0,0005). La réalisation d'une épisiotomie n'a pas d'incidence sur la survenue d'une lésion (37 versus 51 %, p = 0,10) alors qu'il y en a une si on l'associe à une extraction instrumentale (43 versus 1 %, p < 0,0001). Il n'y a pas de différence significative entre les deux groupes concernant le poids de naissance (3381,4 versus 3388,8, p = 0,93), l'existence d'une macrosomie (11 versus 9 %, p = 0,68), le périmètre crânien (347 mm versus 346 mm, p = 0,65) ou le diamètre bipariétal (938 versus 941 mm, p = 0,6). Les paramètres fœtaux ne sont donc pas associés à une augmentation de la survenue de lésions périnéales sévères dans notre série. 4 Discussion Les facteurs de risque associés à la survenue d'une lésion périnéale de grade 3 ou 4 retrouvés dans notre série sont en plus de la primiparité : le poids maternel, l'IMC, une deuxième phase de travail supérieure à 120 minutes, la variété postérieure de la présentation, l'extraction instrumentale quel que soit l'instrument utilisé et la difficulté aux épaules. Les résultats des principales études sont résumés dans le Tableau 2 : primiparité, poids de naissance supérieur à 4000 g, extraction instrumentale et réalisation d'une épisiotomie médiane sont significativement associés à une augmentation de la survenue de lésion du troisième ou quatrième degré. La primiparité est pour la plupart des auteurs un facteur de risque indépendant de lésion sphinctérienne [13] . Dans notre série, il y avait 60,8 % de lésions chez les primipares contre 32,1 % chez les multipares ( p = 0,001). Pour Handa [2] , Zetterstrom [3] et Eason [10] , il s'agit même du facteur le plus pourvoyeur. Hudelist et al. ne retrouvent pas ce paramètre, après analyse de 5377 accouchements par voie basse dont 46 avec rupture sphinctérienne. Seuls le poids de naissance et l'utilisation de forceps ont été retrouvés facteurs de risque indépendants [14] . En effet, l'extraction instrumentale est, dans de nombreuses publications, un facteur de risque de lésion périnéale. Dans notre série, 44 % des patientes ayant eu une extraction instrumentale ont eu une lésion périnéale de grade 3 ou 4, comparées à 1 % chez les patientes indemnes. La plupart des auteurs s'accorde à dire que les ruptures sphinctériennes surviennent plus fréquemment lors de l'utilisation de forceps que lors de l'utilisation d'une ventouse. L'extraction instrumentale par forceps est le premier facteur de risque dans les études de Fenner [9] , Goldberg [11] , Benifla [12] , Hudelist [14] et Christianson [5] . Seuls Handa et al. [2] montrent une supériorité du facteur ventouse en comparaison au facteur forceps (OR 2,30 versus 1,45). D'autres auteurs ne mettent pas en évidence la responsabilité de la ventouse dans la survenue de lésions sévères (Zetterstrom [3] , Mac Arthur [8] et Sultan [15] ). Dans notre série, nous montrons que le risque est associé au forceps de Tarnier mais aussi au forceps de Suzor et aux spatules de Thierry; la ventouse n'étant pas utilisée à la maternité de Beaujon, elle n'a pas pu être intégrée dans les paramètres étudiés. Nous n'avons pas retrouvé de bibliographie concernant les risques respectifs liés à ces instruments. Si l'extraction instrumentale en tant que telle n'est pas à remettre en cause et nécessite donc une précaution toute particulière lors de la pose de l'indication et lors de sa réalisation, ces dernières données doivent être discutées en fonction des habitudes de chaque équipe. En effet, il n'est pas toujours précisé dans les publications quel instrument est préférentiellement utilisé, chaque école d'obstétrique ayant ses habitudes, ce qui peut induire un biais dans l'interprétation des résultats. L'influence de l'origine ethnique est très discutée : Handa et al. [2] , dans une étude portant sur deux millions de naissance, montrent une incidence accrue de lésions périnéales au-delà du deuxième degré chez les femmes d'origine indienne et philippine. De même, Mac Arthur et al. [8] notent une association significative avec une origine ethnique indienne. Pour Goldberg et al. [11] , l'origine asiatique est associée à une augmentation de l'incidence des déchirures périnéales sévères. Comme nous le retrouvons dans notre étude, Wu et al. [16] , dans une publication portant sur 393 patientes, montrent une augmentation du risque relatif par quatre lors d'un dégagement céphalique en variété occipitosacrée. Enfin, différentes publications rapportent un risque accru avec un âge maternel élevé (Mac Arthur [8] , Angioli [17] ). Nos résultats concernant l'épisiotomie sont en accord avec les données de la littérature [18] . Cette dernière suggère un effet protecteur de l'épisiotomie médiolatérale et un risque accru de lésion sphinctérienne associé à l'épisiotomie médiane. En France, la pratique de l'épisiotomie médiane reste isolée, à l'inverse des pays anglo-saxons. Ces résultats diffèrent de ceux de Handa et al. [2] qui montrent que l'épisiotomie médiane a un effet protecteur sur la survenue des lésions du troisème degré mais augmente celle du quatrième degré. Selon Fenner et al. [9] , l'épisiotomie médiane cause trois fois plus de lésion sphinctérienne qu'une épisiotomie médiolatérale, tandis que Coats et al. [19] trouvent une extension vers des lésions du troisième ou quatrième degré dans 11,6 % des cas lors de la réalisation d'une épisiotomie médiane contre 2 % pour une épisiotomie médiolatérale. Poen et al. [20] montrent un odds ratio protecteur à 0,6 en faveur de l'épisiotomie médiolatérale. L'effet protecteur de l'épisiotomie médiolatérale n'a toutefois pas été clairement démontré dans des études randomisées comportant de larges séries et comparant l'absence d'épisiotomie à la réalisation d'une épisiotomie médiane ou médiolatérale. Par ailleurs, nos résultats concernant l'association épisiotomie–forceps sont en accord avec les données de la littérature : il existe une augmentation du risque lors d'une extraction instrumentale avec épisiotomie alors que l'épisiotomie aurait un effet protecteur. C'est également ce que démontrent Dandolu et al. [4] à propos d'une cohorte de 258 507 accouchements voie basse dont 18 888 avec lésions sévères. Les lésions sphinctériennes secondaires à l'accouchement sont visibles dans le post-partum immédiat. Benifla et al. [12] montrent que 45 % des patientes présentant une incontinence anale de novo avaient un défect sphinctérien diagnostiqué échographiquement. Kammerer et al. [21] constatent qu'à six semaines post-partum, la fréquence de rupture sphinctérienne, tant au niveau du sphincter externe qu'interne, est significativement supérieure chez les femmes ayant présenté une lésion sévère. Sultan et al. [15] , dans une étude prospective portant sur 202 patientes, montrent que 35 % des primipares avaient un défect sphinctérien à six semaines, qui persistait dans 28 % des cas à six mois. Différents auteurs ont étudié le rôle possible d'une atteinte du nerf pudendal. Sultan et al. [22] , dans une étude portant sur 50 patientes ayant présenté une lésion du troisième degré comparées aux 8553 autres patientes ayant accouché pendant la même période, rapportent que les latences motrices terminales du nerf pudendal n'étaient pas significativement différentes dans les deux groupes et que, en conséquence, l'incontinence anale pouvait davantage être rapportée à la rupture sphinctérienne qu'à une lésion pudendale. Tetzschner et al. [23] , quant à eux, montrent que l'incontinence anale est associée à un allongement des latences motrices terminales du nerf honteux. Il semble qu'il puisse, dans certains cas, y avoir une responsabilité au moins partielle d'une atteinte pudendale. Concernant l'analyse statistique réalisée dans notre étude, nous aurions souhaité pouvoir caractériser les facteurs de risque de lésion périnéale sévère par régression logistique en calculant les odds ratios associés. Cependant, la précision de la méthode est conditionnée non seulement par le nombre d'événements (suffisant dans notre série), mais aussi par le nombre de patientes exposées au risque (ou non exposées si le nombre de celles-ci est le plus faible) dans chacun des deux groupes présence et absence de lésion. L'examen des données montre que dans la plupart des cas, ce nombre est inférieur à 10. En dessous de dix sujets exposés ou non exposés dans l'un des deux groupes, le calcul fournit des intervalles de confiance excessivement importants traduisant l'imprécision de l'estimation. Dans ces conditions, il n'est pas légitime de recourir à la régression logistique. Par souci d'homogénéité, nous avons donc décidé d'exclure cette méthode de l'analyse. Par ailleurs, il est difficile, compte tenu de notre série, d'effectuer un classement des facteurs de risque par ordre d'importance compte tenu de l'imprécision de certaines estimations. Cependant, cette étude comporte des limites qu'il faut souligner. En effet, il s'agit d'une étude rétrospective dans laquelle les groupes ont été appariés uniquement sur l'existence ou non de lésions périnéales sévères. Par ailleurs, ni les causes ni les praticiens des extractions instrumentales n'ont été individualisés et la mesure des corps périnéaux n'a pas été effectuée. Enfin, les positions maternelles, l'expression utérine, le massage périnéal, non plus que la recherche de lésions occultes n'ont été relevés. 5 Conclusion Les résultats de notre étude sont en accord avec les données actuelles de la littérature : primiparité, surcharge pondérale, deuxième phase de travail prolongée, extraction instrumentale, variété postérieure de la présentation, difficulté aux épaules sont des facteurs de risque de survenue de lésions périnéales du troisième ou quatrième degré. L'accouchement par voie basse reste néanmoins la voie la plus sûre et la plus économique d'accouchement. S'il est certain qu'il est difficile d'éviter toutes les lésions périnéales sévères, la connaissance de ces facteurs de risque et leur prise en compte lors des conduites à tenir obstétricales devraient conduire à une réduction de leur survenue. Il est indispensable d'insister sur la prise en charge des femmes ayant présenté une lésion périnéale sévère tant sur le plan de la rééducation sphinctérienne du post-partum que sur le suivi à long terme. De cette surveillance rapprochée dépend leur continence ultérieure et, le cas échéant, leur devenir obstétrical. Références [1] E.K. Fornell G. Berg O. Hallbook L.S. Matthiesen R. Sjodahl Clinical consequences of anal sphincter rupture during vaginal delivery J. Am. Coll. Surg. 183 6 1996 553 558 [2] V.L. Handa B.H. Danielsen W.M. Gilbert Obstetric anal sphincter lacerations Obstet. Gynecol. 98 2 2001 225 230 [3] J. Zetterstrom A. Lopez B. Anzen M. Norman B. Holmstrom A. 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